Commençons par quelques définitions étymologiques.
Krisis en latin c’est la phase décisive d’une maladie, celle où tout va basculer. Allons-nous guérir ou mourir ? En grec Krinein veut dire décider, juger. Dans les deux cas, le sens premier de « crise » est de séparer le bon grain de l’ivraie, et ce terme renvoie à une racine indo-européenne krei : passer au crible.
Ce que l’on peut dire c’est que le mot crise correspond à un moment clé, un moment charnière, un entre deux mondes où en quelque sorte, « tout doit se décider ».
Crise en hébreux se dit Machber, et le sens est double. Il veut dire crise mais aussi table d’accouchement.
Symboliquement, nous allons retenir cette image et voir comment nous pouvons passer d’une matrice à une autre.
Comment passer d’un système ou d’un univers qui nous structure et permet un développement à un autre? Par quelle pensée ? Et comment cette pensée peut-elle être modifiée ?
Au début de chaque histoire de crise, nous sommes dans une matrice connue et surtout que l’on reconnaît comme une zone de confort.
Si nous reprenons l’image de l’accouchement, revenons sur les étapes.
Le bébé est dans un univers agréable que l’on pourrait qualifier de zone de confort, l’utérus. Puis il arrive un moment où ce petit-être doit changer de matrice pour se développer. L’ancienne ne lui convient plus, mais lui ne le sait pas.
C’est pourtant lui qui va envoyer le signal, et la nature étant bien faite, elle provoque une secousse pour le faire bouger, une contraction. Le combat commence. Le corps et la matrice entrent en dynamique. Sans en avoir de souvenir précis, tous les scientifiques s’accordent pour dire que ce moment, ce passage, va être violent et bouleversant.
Ici, par la dynamique des contractions, le col de l’utérus s’ouvre de plus en plus et arrive le moment du passage. Le bébé est engagé dans une nouvelle matrice temporaire et inconnue dans laquelle il va vivre des émotions qui vont toucher son inconscient comme la peur, la terreur même. La dynamique et le combat continuent parce que le chemin continue.
Des alternatives ?
Non, le bébé n’a pas le choix. Soit il reste dans les matrices précédentes et il meurt étouffé, soit il bouge, et ne peut alors échapper à l’angoisse.
A la sortie, le voilà plongé dans une nouvelle matrice qui lui demande une profonde adaptation. Il quitte un milieu liquide pour un milieu aérien. Il doit se nourrir par la bouche et non plus par un cordon.
La nature est remplie d’image d’êtres vivants qui vivent une transformation ou une mutation et ces images constituent notre langage symbolique d’aujourd’hui . Nous pensons tous à la chenille qui devient papillon en se débarrassant de sa chrysalide. Quant au homard, en abandonnant sa carapace, le voici un moment nu, fragile, vulnérable jusqu’à ce que sa nouvelle peau se constitue en carapace.
Dans une nouvelle matrice, tout est à reconstruire…
Arrêtons nous à ce moment du passage, celui que nous vivons actuellement. Il est douloureux. A quel endroit du passage chacun d’entre nous se sent aujourd’hui ? Dans le deuxième, où l’on sent que tout bouge et où on n’ose pas s’engager dans le col ? Dans le col ? au début du nouveau monde ? Nos avis diffèrent là dessus, chacun avançant à son rythme suivant sa constitution. Mais nous sommes pratiquement tous d’accord pour constater que nous passons à quelque chose de nouveau.
Pour certains, ne serions-nous pas dans ce moment où ce qui est caché apparaît, ne serions-nous pas dans le clair obscur d’Antonio Gramsci ?
« Le vieux monde se meurt, le nouveau monde
tarde à apparaître, et dans le clair-obscur, surgissent les monstres »
Antonio Gramsci
Les monstres ne manquent pas. Leurs ombres planent au dessus de notre société faisant fi des règles du vivre ensemble et faisant dire que la période que nous vivons est apocalyptique.
Si dans l’inconscient collectif, l’apocalypse veut dire la fin du monde, il signifie aussi révélation. Qu’est ce qui va se révéler à nous ? Qu’est ce qui s’est révélé pendant le confinement ? Notre lien avec la nature ? L’émerveillement de voir le printemps ?
Si personne n’a la solution salvatrice et pérenne aujourd’hui, il y a cependant des pistes et des lueurs d’espoir qui s’ouvrent à nous. Parmi elles, à Question de cœur, nous avons choisi celles des prises de conscience personnelles, de notre potentiel d’adaptation et de créativité par le chemin du cœur.
Le cœur et le courage qui en découle pour vaincre les monstres, peuvent nous conduire à un nouvel équilibre entre ce que nous savons et ce que nous ne savons pas, ils peuvent nous guider dans ce clair-obscur, créer un trait d’union entre les sciences et les émotions.
Comme le dirait Anna Arendt « une crise, c’est un face-à-face inédit entre soi et les choses essentielles qui sont d’habitude recouvertes sous les idées toutes faites et les préjugés. »
Comment traverser la crise ensemble avec courage ?
Question de cœur vous invite à la première conférence en ligne avec Samy Kallel, co-auteur du livre « Le leadership du coeur » et du roman « Viens voir la vie autrement », pour revenir avec lui sur le sens de la crise. Inscrivez-vous dès maintenant pour notre webinaire « Ensemble, traversons la crise » le mardi 6 Octobre 2020.
– Samy Kallel et Anne Dorr –